Crotte de loir ou de rat : méthodes simples pour les distinguer et agir efficacement

Crotte de loir ou de rat : méthodes simples pour les distinguer et agir efficacement

Un matin, vous ouvrez la porte du grenier ou du local poubelle… et là, surprise : une poignée de petites crottes sombres vous attend, posées comme un message que vous n’aviez pas demandé. Rat ? Loir ? Souris mutante ? Et surtout : est-ce que je dois paniquer, ou simplement mieux ranger le garde-manger ?

Identifier correctement l’auteur de ces petits « cadeaux » est loin d’être un détail. Selon qu’il s’agit d’un loir ou d’un rat, la réponse à apporter n’est ni la même, ni avec les mêmes obligations légales. Dans un cas, on parle d’un animal protégé à gérer avec délicatesse. Dans l’autre, d’un nuisible urbain à traiter sans tarder.

Dans cet article, je vous propose une méthode simple, presque comme une petite enquête de terrain, pour distinguer les crottes de loir de celles de rat, et surtout savoir quoi faire ensuite, sans se perdre dans les fausses pistes.

Pourquoi il est essentiel de faire la différence

Derrière une crotte, il y a toute une histoire :

  • Les loirs (et leurs cousins lérots, muscardins) sont des petits rongeurs forestiers, qui s’invitent parfois dans les greniers. Certaines espèces sont protégées en France : les éliminer ou les capturer sans précaution peut être illégal.
  • Les rats, eux, sont des habitués des villes, responsables de dégâts matériels, de nuisances olfactives, et potentiellement de transmission de maladies. Là, on ne parle plus de cohabitation pacifique, mais de gestion sanitaire.

Autrement dit : confondre des crottes de loir avec celles de rat, c’est soit :

  • minimiser un problème de salubrité potentiellement sérieux,
  • ou au contraire vouloir détruire un animal protégé qui ne demandait qu’un coin de grenier pour hiberner.

La bonne nouvelle : avec un minimum d’observation, vous pouvez déjà faire un tri très efficace.

Loir ou rat : deux rongeurs, deux modes de vie

Avant de regarder le « produit fini », parlons un instant des auteurs.

Le loir (souvent le Loir gris) :

  • Corps : 12 à 18 cm, queue touffue, air de petit écureuil fatigué.
  • Mode de vie : nocturne, aime les greniers, combles, cabanes de jardin.
  • Alimentation : fruits, graines, noisettes, parfois insectes.
  • Particularité : grand amateur d’hibernation, il peut disparaître plusieurs mois.

Le rat (souvent le rat brun ou surmulot) :

  • Corps : 20 à 30 cm, queue nue, épaisse et plus longue que le corps.
  • Mode de vie : très opportuniste, égouts, caves, locaux poubelles, jardins, planchers.
  • Alimentation : omnivore, de la graine au déchet de kebab.
  • Particularité : reproduction rapide, colonie structurée, forte capacité de dégâts.

Deux profils très différents… qui laissent derrière eux des indices tout aussi distincts, à commencer par leurs crottes.

Les crottes de loir : petits cylindres discrets

Les déjections de loir sont généralement plus proches de celles de souris que de celles de rat. Voici leurs principales caractéristiques.

Taille et forme

  • Longueur : environ 5 à 10 mm.
  • Forme : cylindrique, assez régulière, parfois légèrement courbée.
  • Extrémités : souvent légèrement pointues, mais moins marquées que chez certaines souris.

Couleur et texture

  • Couleur : brun foncé à noir lorsqu’elles sont fraîches.
  • Vieillissement : elles deviennent plus mates, parfois grises avec le temps.
  • Texture : plutôt sèche, friable quand on la manipule (avec gants, toujours).

Disposition des crottes

  • Présence éparpillée ou en petits amas de quelques crottes.
  • Surtout dans les lieux calmes et en hauteur : greniers, poutres, charpentes, surfaces de rangement.
  • Souvent associées à des restes de nourriture : coquilles de noisettes, noyaux grignotés, fruits secs entamés.

Odeur

L’odeur reste modérée. On ne parle pas de « mur de fumée ammoniacale » comme avec certaines colonies de rats. Par contre, on peut sentir une légère odeur de rongeur/graisse mêlée aux réserves de nourriture.

Les crottes de rat : plus grosses, plus nombreuses, plus inquiétantes

Les crottes de rat, surtout du rat brun (surmulot), ont une signature bien particulière.

Taille et forme

  • Longueur : 12 à 20 mm en moyenne, parfois plus.
  • Forme : cylindrique, assez « trapue ».
  • Extrémités : généralement arrondies chez le rat brun ; chez le rat noir, elles peuvent être plus pointues.

Couleur et texture

  • Couleur : noir à brun très foncé lorsqu’elles sont fraîches.
  • Texture : luisante et légèrement molle au début, puis durcissement avec le temps.

Quantité et regroupement

  • Production abondante : un rat peut produire 40 à 50 crottes par jour.
  • On observe souvent des amas importants le long des murs, derrière les objets, près des sources de nourriture.
  • Les crottes forment parfois de véritables zones souillées, avec urine et traces grasses.

Odeur

L’odeur d’un foyer de rats est très caractéristique : piquante, forte, due au mélange crottes + urine + graisses de frottement. Dans un local fermé, cela devient vite difficile à ignorer.

Comparatif rapide : crotte de loir ou de rat ?

Pour vous simplifier la vie, voici les grands critères à observer :

  • Taille :
    • Moins de 1 cm : plutôt loir (ou petite souris).
    • Autour de 1,5 à 2 cm : plutôt rat.
  • Quantité :
    • Quelques crottes, éparses : fréquentes chez le loir solitaire.
    • Beaucoup de crottes, en amas : typique d’une colonie de rats.
  • Emplacement :
    • Grenier, poutres, endroits en hauteur, près de réserves de fruits/graines : loir probable.
    • Caves, locaux poubelle, bas des murs, autour des canalisations : rat très probable.
  • Ambiance générale :
    • Quelques bruits nocturnes, peu d’odeur : loir possible.
    • Bruits réguliers, forts, odeur marquée, dégâts évidents : scénario « rat ».

Et si vous hésitez, rien n’empêche de prendre une photo nette avec un objet de référence (pièce de monnaie, règle) et de la montrer à un professionnel.

Autres indices pour départager loir et rat

Les crottes, ce n’est qu’une partie de l’histoire. Les nuisibles laissent toujours d’autres signatures.

Les bruits

  • Loir : bruits nocturnes plutôt légers, courses dans les combles, grattements dans l’isolant. On le perçoit souvent au-dessus des plafonds.
  • Rat : bruits plus lourds, parfois accompagnés de couinements, surtout dans les cloisons, sous les planchers, dans les caves.

Les dégâts

  • Loir :
    • Noix, noisettes, fruits secs grignotés.
    • Nids dans l’isolant, matériaux de nidification (morceaux de papier, textiles).
  • Rat :
    • Câbles électriques rongés, sacs poubelles éventrés.
    • Boîtes alimentaires attaquées, trous dans les murs en plâtre.
    • Terriers au pied des murs extérieurs, dans les jardins, près des égouts.

Les traces de passage

  • Loir : parfois peu visibles, petites empreintes fines, frottements plus discrets.
  • Rat :
    • Traces grasses le long des murs, sur les tuyaux.
    • Empreintes et marques de queue dans la poussière.

Méthodes simples pour identifier à la maison

Vous n’avez pas besoin d’un laboratoire pour analyser une crotte. Juste un peu de méthode et quelques précautions.

1. Protégez-vous

  • Mettez des gants jetables avant de toucher quoi que ce soit.
  • Évitez de balayer à sec : la poussière contaminée peut se respirer. Utilisez un chiffon humide ou un essuie-tout jetable.
  • Aérez la pièce si possible.

2. Observez la taille

  • Munissez-vous d’une règle ou d’un mètre ruban.
  • Mesurez une crotte sans l’écraser :
  • 5 à 10 mm : suspicion loir ou petite souris.
  • 12 à 20 mm : suspicion rat.

3. Regardez l’emplacement

  • Grenier ou combles, proche de matériaux isolants : piste loir.
  • Cave, garage, cuisine, proche de poubelles ou canalisations : piste rat.

4. Notez la quantité et la fréquence

  • Une petite zone localisée, quelques crottes : animal isolé.
  • Multiples zones, crottes fraîches tous les jours : colonie en activité, scénario typique de rat.

5. Documentez si besoin

  • Prenez une photo nette avec bonne lumière.
  • Ajoutez un objet de référence (pièce de 1 €) pour l’échelle.
  • Cela aidera un dératiseur ou un service de protection de la faune à confirmer l’identification.

Que faire si ce sont des crottes de loir ?

Vous avez affaire à un petit squatteur forestier qui a choisi votre grenier comme résidence secondaire. La tentation peut être de « régler ça vite », mais une mise au point s’impose.

Statut et précautions

  • En France, certaines espèces de loirs et de gliridés sont protégées. Il est interdit de les capturer, les blesser ou les tuer sans autorisation.
  • Avant toute action radicale, renseignez-vous auprès de la LPO, d’une association naturaliste ou de votre préfecture.

Objectif : décourager, pas exterminer

La stratégie, dans ce cas, c’est de rendre le lieu moins intéressant pour lui :

  • Retirez les sources de nourriture :
    • Stockez les graines, fruits secs, aliments pour animaux dans des boîtes hermétiques.
    • Évitez les sacs en papier ou en carton.
  • Protégez les accès :
    • Repérez les points d’entrée (tuiles déplacées, trous en toiture, aérations non grillagées).
    • Mettez en place un grillage métal fin sur les ouvertures, bien fixé.
  • Réduisez les zones confortables :
    • Évitez les piles de cartons et vieux tissus dans les combles.
    • Rangez, limitez les recoins propices aux nids.

Et les pièges ?

Les pièges létaux sont à éviter tant pour des raisons légales que éthiques. Certains pièges non traumatiques (cages de capture) peuvent être utilisés, mais toujours en accord avec la réglementation et avec une solution de relâcher dans un environnement adapté.

Que faire si ce sont des crottes de rat ?

Si l’identification penche clairement vers le rat, on change de registre. Là, l’enjeu est sanitaire et structurel.

Première étape : ne pas attendre

  • Une colonie de rats se reproduit vite. Quelques individus peuvent devenir plusieurs dizaines en quelques mois.
  • Plus vous intervenez tôt, plus la gestion est simple et moins coûteuse.

Mesures immédiates

  • Assainissez :
    • Mettez les ordures dans des sacs solides, bien fermés.
    • Évitez les déchets alimentaires à l’air libre, même dans une cour ou un jardin.
  • Supprimez les points d’eau et nourriture faciles :
    • Videz les gamelles la nuit (chiens, chats, poules).
    • Rangez les aliments dans des contenants hermétiques.
  • Identifiez les accès :
    • Trous dans les murs, conduites mal jointes, bouches d’égout ouvertes, etc.
    • Signalez les problèmes d’égout à la mairie ou au syndic si nécessaire.

Traitement : quand appeler un professionnel ?

Quelques indicateurs que l’intervention professionnelle devient indispensable :

  • Vous trouvez des crottes de rat dans plusieurs pièces.
  • Vous entendez des bruits réguliers la nuit dans les murs ou plafonds.
  • Vous avez repéré des dégâts sur câbles électriques ou structures.
  • Vous avez déjà essayé des pièges ou produits du commerce sans réelle amélioration.

Un dératiseur sérieux :

  • Fera un diagnostic précis (type de rat, voies de circulation, zones de nidification).
  • Mettra en place un plan de traitement adapté et sécurisé (souricide, postes d’appâtage, pièges).
  • Vous aidera à prévenir les réinfestations (bouchage de trous, conseils d’hygiène, suivi).

Et non, déposer au hasard des sachets de mort-aux-rats dans une cave sans savoir ce qu’on fait n’est pas un plan. C’est juste le meilleur moyen d’empoisonner un chat du voisinage et de retrouver un rat mort derrière un doublage de mur.

Hygiène et nettoyage après découverte de crottes

Loir ou rat, une chose est sûre : on ne laisse pas les crottes sur place en se disant « ça sèchera bien tout seul ».

Règles de base pour nettoyer

  • Portez des gants (et un masque si la pièce est très souillée ou peu ventilée).
  • Évitez d’aspirer directement avec un aspirateur domestique sans sac adapté (risque de remettre des particules en suspension).
  • Ramassez les crottes avec un essuie-tout humide, jetez-les dans un sac fermé.
  • Nettoyez la zone avec un détergent, puis, si nécessaire, un désinfectant adapté.

Surfaces particulières

  • Textiles : lessive à haute température si possible.
  • Isolant fortement souillé : à faire évaluer, parfois un retrait partiel ou complet est nécessaire, surtout après infestation de rats.

Prévenir plutôt que subir

Identifier une crotte, c’est bien. Ne plus en trouver, c’est mieux. Quelques habitudes simples limitent l’installation durable aussi bien des loirs que des rats.

  • Propreté et rangement :
    • Limitez les zones encombrées (caves, greniers, remises).
    • Stockez les aliments et graines dans des contenants durs (métal, plastique épais).
  • Protection du bâti :
    • Pose de grilles fines sur les aérations.
    • Réparation des fissures, trous, passages de câbles mal colmatés.
  • Gestion des déchets :
    • Bacs fermés, pas de sacs posés à même le sol en extérieur.
    • Nettoyage régulier des zones de stockage des poubelles.
  • Surveillance régulière :
    • Un coup d’œil périodique aux greniers, caves et locaux poubelles.
    • Recherche de nouveaux indices : crottes, bruits, traces de grignotage.

La prochaine fois que vous tombez nez à nez avec de petites crottes sombres, vous aurez donc une grille de lecture : taille, quantité, localisation, odeur, contexte. De quoi transformer un moment de dégoût en mini-enquête naturaliste, et surtout en action adaptée : protection pour le loir, dératisation pour le rat.

Et si le doute persiste malgré tout, n’hésitez pas à faire appel à un professionnel : sur le terrain, on finit toujours par trouver l’auteur des crottes. Les rongeurs, eux, ne lisent pas les blogs, mais ils laissent des indices partout.